On ne naît pas plus européen qu’on naît humaniste, on le devient
1.Sous l’impulsion du Traité de Nice (2000), la réforme institutionnelle porte sur le processus d’élargissement de l’Europe (cf. critères de Copenhague) et le projet d’une Constitution européenne entamé en 2001. Celui-ci n’ayant pas été ratifié par voie parlementaire ou par voie référendaire par l’ensemble des 25 Etats membres, il ne serait question de réécrire ou de réduire la Constitution aux parties consensuelles (parties I et II), l’objectif de la Constitution étant de coordonner une Europe humaniste, dite aussi Europe des idées, c’est-à-dire universelle, culturelle, sociale, et une Europe politique et économique.
2.C’est rappeler en même temps le mauvais traitement que l’on fait au concept libéral des Humanistes puis des Lumières (confondu avec la globalisation et la mondialisation) pour lesquels la liberté (et non le libéralisme) est une recherche d’union dans la diversité humaine. Ceci passe par la volonté d’une cohésion de la part de tous : des peuples, des états nations, des institutions, des secteurs économiques, de manière à installer durablement l’égalité, la liberté démocratique, la paix et la croissance.
3.Ce concept s’écarte d’une géographie strictement physique de l’Europe, de même qu’il s’écarte de l’Europe chrétienne dont Charlemagne est le paradigme. Si l’Europe des idées a une géographie, elle est intellectuelle : elle a pour contenu des idées qui parviennent à ré-unir les nations au-delà de leurs divisions historiques, plus souvent idéologiques que politiques. Tel est le sens déjà donné à la légende d’Europe, cette vierge originaire de Syrie ou de Libye (selon les versions de la légende), enlevée par Zeus métamorphosé en taureau pour la conduire en Grèce puis en Crète où elle s’unit au roi. Les Anciens la représentaient sous les traits d’une déité réunissant toutes les richesses : savoirs, pouvoirs étatiques, abondance de biens. Ce mythe devint l’emblème de la République des lettres & des sciences pour les Humanistes.
4.Aujourd’hui, le concept est moins idéaliste et plus pragmatique puisqu’il permet d’activer les alliances entre les états et les cultures. Toutefois il n’est pas simple de trouver le critère qui marque l’appartenance d’une nation à la culture ou à l’identité européenne, car, à considérer la chrétienté romaine, le monde musulman, le monde protestant, le monde juif, on se trouve en face d’un univers de plusieurs " autres ". Force est de constater que l’héritage gréco-latin ne suffit pas pour définir l’Europe des modernes pas plus qu’il est réaliste de s’accrocher à une géographie physique ou à un modèle comme le christianisme.
5.C’est précisément ce qu’ont compris les auteurs de la Constitution qui offre aux peuples d’Europe la possibilité de " forger leur destin commun ", de prendre " conscience de leurs responsabilités à l’égard des générations futures et de la planète ", de faire d’une " grande aventure " " un espace privilégié de l’espérance humaine ".
6.Cependant on ne naît pas plus européen qu’on naît humaniste. Si bien que ces idées ne seront assimilées et l’identité européenne conquise qu’à partir du moment où les peuples auront dépassé l’individu et l’héritage communautaire pour s’efforcer de devenir européen, c’est-à-dire un autre soi.
Sources :
1° " Une période de réflexion, d’explication et de débat dans tous les Etats membres, qu’ils aient ou non ratifié la Constitution, est à présent en cours. Le Conseil européen examinera, sous la Présidence autrichienne (1 ère moitié de l’année 2006), l’état des débats sur la ratification du traité constitutionnel. Le processus de ratification par les Etats membres n’est donc pas abandonné. Son calendrier sera, si nécessaire, adapté selon les circonstances dans les pays qui n’ont pas encore ratifié. " http://europa.eu.int/constitution/referendum_fr.htm
2° Carte interactive sur la ratification : http://europa.eu.int/constitution/ratification_fr.htm